Les Phéniciens prenant en considération les vents maritimes avaient coutume de construire dans les villes du littoral deux ports, un Nord et un Sud.
Tyr, la mère de Carthage, dont les navires parcouraient jadis toutes les mers, possédait des ports proportionnés à son immense commerce : un port Nord connu sous le nom de "Port Sidonien" et un port Sud, le plus grand du monde antique, connu sous le nom de "Port Egyptien", étant donné les relations commerciales importantes entre la Phénicie et l'Egypte.
Le port commercial actuel de Tyr est construit sur l'ancien port Sidonien. D'après les manuscrits, il était plus large que le port actuel et c'était probablement l'entrée principale de la ville par la mer.
En 1987, une grande partie du port Nord (sidonien) avait été remblayée pour permettre la construction d’installations portuaires (immeubles, douanes, parking...). Aujourd’hui, des immeubles de 16 et 17 étages se dressent sur les sites « protégés ». Des découvertes fortuites capitales pour l’histoire de la cité (basilique paléochrétienne, sarcophages,...) ont subi des dégâts irrémédiables.
En avril 1998, Le Ministère Libanais des Travaux Publics a entrepris, des travaux de remblaiement d’une partie de la baie de Tyr afin d’élargir la voie d’entrée de la ville. Il a été procédé au remblai de la mer sur 50 mètres de large alors que des terrains appartenant à l’état de 20 mètres de large existaient du côté opposé à la mer, libres de toute construction qui pouvaient être utilisés immédiatement et qui aurait permis ainsi de conserver, dans l’intérêt de la collectivité, cette baie magnifique réputée pour sa beauté historique. Malheureusement, des tonnes de remblais ont été déversées dans cette zone sans tenir compte du potentiel archéologique sous-marin, de l’environnement et de l’histoire.
Le 10 juin 1998, le Président de l’AIST, Monsieur Jean Leclant avait adressé au Ministre Libanais de la Culture et au Ministre Libanais des Travaux Publics, la motion votée par l’AIST le 4 juin 1998, à l’UNESCO, lors de son Assemblée Générale priant «instamment et respectueusement le Gouvernement du Liban d’ordonner, en tant que mesure conservatoire, l’arrêt immédiat des travaux de remblaiement avant que des dommages irréparables ne soient infligés à un site historique d’une inestimable valeur».
Suite à nos courriers, le Directeur Général de l’UNESCO vivement préoccupé par la situation à Tyr a rappelé aux autorités libanaises les obligations qui leur incombent en leur qualité de signataires des conventions internationales relatives à la protection du patrimoine culturel et du fait des engagements qu’elles ont pris dans le cadre de la Campagne Internationale pour Tyr. Il a, en outre, chargé le Directeur de la Division du patrimoine culturel et le Directeur du Centre du patrimoine mondial d’adresser au Ministre libanais des travaux publics une lettre pour le prier de surseoir à tous travaux modifiant le caractère du site de Tyr et de ses environs, en rappelant les dispositions de la recommandation adoptée par le Bureau du patrimoine mondial à sa 22è session (22-27 juin 1998).
Concernant le remblaiement de la baie à l’entrée Nord de Tyr, Monsieur Drocourt, l’expert qui avait été mandaté par l’UNESCO recommandait dans les conclusions de son rapport:
Grâce aux interventions du Président du Comité Français, M. l’Ambassadeur Paul Blanc, un excellent article de Madame Anne-Marie ROMERO « La ville de Tyr sous les bulldozers » a été publié dans le Figaro du lundi 28 septembre 1998. Cet article a eu le mérite de montrer la nécessité de préserver ce site « chef d’œuvre du patrimoine mondial » contre « les assauts destructeurs des engins de terrassement ». Une carte très explicite montrait les travaux menés dans les zones archéologiques. Notre bureau à Paris a reçu de nombreux appels à la suite de cette publication.
Malheureusement, aujourd’hui, les travaux sont terminés. L’entrée Nord de la ville est asphaltée causant des dégâts irréversibles.
Pourtant nous avons pu constater qu’une action énergique pouvait stopper ces projets insensés puisque notre campagne de sensibilisation contre les projets de remblaiement de la baie de Tyr pour la création d’un port touristique et d’un port commercial ont été suspendus grâce notamment aux différentes interventions du Centre du Patrimoine Mondial et de l’UNESCO auprès des Autorités Libanaises.